Retour sur une rencontre bouleversante au Secours Catholique de Cergy

Vendredi 20 juin, journée nationale de la solidarité avec les réfugiés, j’ai rencontré la délégation territoriale Val d’Oise du Secours Catholique à Cergy. J’y ai découvert une organisation basée sur la bienveillance, l’écoute et l’accompagnement des personnes vulnérables grâce à l’action de 32 équipes réparties sur tout le territoire. J’y ai également fait la connaissance de Hadria et Mohamed, deux bénévoles aux parcours de vie marqués par l’exil et par la dure réalité des procédures de régularisation.

Des conditions d’arrivées marquées par un espoir : celui d’une vie libre

“Nous avons tous quitté notre pays à cause des mêmes raisons : endoctrinement religieux, manque de perspectives, guerre…” – Mohamed

Hadria, mère de deux enfants, a quitté l’Algérie avec son mari en 2022. Ils voulaient offrir un avenir meilleur à leurs enfants : des conditions d’enseignements stable et un environnement sécurisé. Cependant, à leur arrivée, ils ont dû recourir au 115, une solution d’urgence souvent instable. Les hébergements changent fréquemment, et se situent parfois loin de l’école de ses enfants. Il lui arrive de passer sa journée à attendre devant les grilles de l’établissement, n’ayant pas les moyens de payer un titre de transport pour rentrer chez elle. La famille aimerait accéder à un logement. Depuis son arrivée en France, le père de famille travaille et Hadria s’est engagée comme bénévole au Secours Catholique. Cependant, sans papier, ils ne peuvent accéder à un logement et sont donc dans une situation « bloquée ».

Mohamed, lui, est arrivé pour poursuivre ses études en droit à l’université Paris-Nanterre avec un visa étudiant. Une fois diplômé, il a cherché un emploi mais il est rapidement freiné dans ses démarches par l’apparition soudaine d’un handicap visuel. Il se retrouve dès lors sans papiers, son visa d’étudiant ayant expiré, sans avoir eu le temps et l’opportunité de trouver un emploi au regard de son handicap, et ce malgré plusieurs stages en cabinet d’avocat.

Leur quotidien est dès lors marqué par la peur du contrôle, la peur d’un retour au pays qui leur est désormais impossible.

Entre reconnaissance et incohérences

Tous deux sont extrêmement reconnaissants vis-à-vis de leur environnement et des personnes rencontrées depuis leur arrivée. Ils n’aspirent qu’à une chose : rester en France, dans ce pays des libertés, pour poursuivre ce qu’ils ont construit ici.

Aujourd’hui, après diverses démarches judiciaires, Mohamed a obtenu le bénéfice d’un titre de séjour. Ce parcours fut semé d’embûches. Et il partage aujourd’hui ses questionnements vis-à-vis du système français actuel. Diplômé en droit, il dispose de compétences qui lui auraient permis de travailler et de subvenir à ses besoins s’il avait eu des papiers. Or, sans papier, il a donc été hébergé par le 115, avec une chambre d’hôtel à disposition. Il est très reconnaissant vis-à-vis de cette possibilité qui lui a été laissé mais s’étonne : « On nous prive de papiers, et ainsi, on nous prive de notre liberté de travail…Et l’État dépense de l’argent pour maintenir dans l’illégalité des personnes qui seraient pourtant prêtes à contribuer à la richesse de la société ».

La famille d’Hadria, quant à elle, n’est toujours pas régularisée. Et, là encore, elle souligne avec inquiétude certaines situations dans lesquelles sa famille se retrouve. C’est ainsi qu’elle souligne que sa famille n’a pas accès à l’aide médicale d’Etat, ni à la sécurité sociale. Son mari percevant un salaire, qu’elle déclare auprès des services de l’Etat, la famille dépasse le plafond qui lui permet de bénéficier de l’Aide Médicale d’Etat. Néanmoins, sans papiers, la famille ne peut pas prétendre à la sécurité sociale ordinaire. Une aberration administrative, qui a des répercussions fortes sur sa vie.

Et pourtant, tous deux restent très dignes, très reconnaissants vis-à-vis de la France, et toujours prêts – malgré le combat quotidien qui est le leur – à offrir leur force de travail et leur temps pour la France et les autres.

S’engager auprès de l’association leur a offert une bouffée d’oxygène bienvenue dans leur quotidien difficile.

Mais malgré cet investissement, leur situation administrative reste fragile. Les témoignages d’Hadria et de Mohamed sont précieux et devraient nourrir chacun d’entre nous pour penser une politique d’immigration ouverte.

Hadria et Mohamed sont deux exemples de parcours d’immigration parmi tant d’autres parcours invisibles.

Cet article aura peut-être permis de rendre leur parcours un peu moins invisible en partageant avec vous un peu de leur quotidien.

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