Des moyens contre les violences faites aux femmes : les mots ne suffisent pas

Avec mon collègue Sénateur Arnaud Bazin, nous sommes rapporteurs spéciaux de la mission Solidarité, Insertion et égalité des chances dans le cadre du contrôle parlementaire sur l’évolution du financement de la lutte contre les violences faites aux femmes. A ce titre, nous avons entamé un cycle d’auditions afin d’élaborer un rapport relatif à ce contrôle, qui sera rendu début juillet 2025.

Un contexte alarmant : le sexisme progresse toujours et encore

Tout d’abord, notons que notre contrôle parlementaire d’effectue dans le cadre d’un contexte des plus moroses en matière de violences faites aux femmes. En 2024, dans son rapport annuel sur l’état des lieux du sexisme en France, le Haut Conseil à l’égalité dresse, en effet, un tableau des plus alarmant. Les violences faites aux femmes sont omniprésentes dans le quotidien : trois incubateurs inoculent le sexisme aux enfants dès leur plus jeune âge : la famille, l’école et le numérique.

Les chiffres sont effrayants : le sexisme progresse d’année en année. Chez les jeunes adultes masculins par exemple, mais aussi parfois chez les femmes, on observe un retour à l’idée « qu’il est normal que les femmes s’arrêtent de travailler pour s’occuper des enfants » (+7 points soit 34% des interviewés). De même, plus d’un homme sur 5 de 25 ans à 34 ans considère normal d’avoir un salaire supérieur à sa collègue à poste égal.

Le sexisme fait tellement partie de notre vie de tous les jours que 9 femmes sur 10 déclarent avoir personnellement subi une situation sexiste.

Et que dire des violences sexuelles, qui elles-aussi et malheureusement, ne reculent pas : 37% des femmes déclarent avoir vécu une situation de non-consentement et ce chiffre grimpe à plus de 50% chez les 25-34 ans ! Quel avenir voulons-nous pour nos enfants ?

Le travail en cours : un diagnostic sur l’évolution des financements

Nous avons entamé un travail de diagnostic de l’évolution des financements de la lutte contre les violences faites aux femmes. Plusieurs auditions ont été organisées afin de mieux saisir les défis et enjeux des acteurs de terrain. Par exemple, nous avons auditionné plusieurs représentants d’associations d’aide aux victimes de violences : l’amicale du Nid, la Fondation Scelles, le mouvement du Nid, la Fédération nationale des CIDFF, Femmes pour le dire Femmes pour agir, ou encore la Coalition Abolition Prostitution.

Les auditions sont toutes plus inquiétantes les unes que les autres. Je retiens trois éléments essentiels à ce stade des auditions, qui transcendent les auditions :

  • Aujourd’hui, les fonds nécessaires à la lutte contre ces violences sont insuffisants. De nombreuses associations féministes, telles que la Fondation des Femmes et #NousToutes, revendiquent un budget à hauteur de 2,6 milliards d’euros pour financer une politique publique ambitieuse, à même de réduire les inégalités et mettre un terme à ces violences. La raréfaction des subventions et la fluctuation des financements compromettent gravement la continuité des actions menées envers les femmes victimes de violences.
  • Les chiffres parlent d’eux-mêmes : l’éducation à l’égalité entre les femmes et les hommes doit s’inscrire dès le plus jeune âge : les actions de sensibilisation des acteurs de la santé, de la justice, de la police ou des travailleurs sociaux sont des leviers essentiels pour prévenir et lutter contre les violences faites aux femmes.
  • La lutte contre les violences faites aux femmes est trop souvent une politique publique délaissée au profit d’autres politiques publiques. Je retiens avec émotion les auditions relatives à la sortie du système prostitutionnel des femmes et à quel point d’autres politiques publiques, telle celle sur l’immigration, peuvent supplanter celle de la lutte contre les violences faites aux femmes. La question de l’exploitation des femmes est un sujet des plus complexes : il ne faut jamais oublier les liens entre migrations, traite des femmes et prostitution et agir en connaissance de cause.

Ces auditions nourrissent à ce stade la rédaction d’un rapport budgétaire que nous présenterons début juillet 2025. Il servira de base aux échanges dans le cadre Projet de Loi de Finances 2026. Son ambition est claire : garantir le financement et permettre le déploiement de dispositifs efficaces adaptés aux besoins des victimes, sur tout le territoire.

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