Les saisonniers du Ministère de la Santé

Jeudi 25 avril 2024, j’ai rencontré, avec Monsieur Arnaud Le Gall, député du Val d’Oise, une délégation de plus de 30 médecins PADHUE (Praticiens à diplôme hors Union Européenne) de l’hôpital de Gonesse.  La situation des médecins étrangers PADHUE dans nos hôpitaux est insoutenable et continue de se dégrader. L’hôpital public va craquer.

Le Val-d’Oise est aujourd’hui un désert médical, où l’offre de soins est particulièrement réduite, notamment dans certains secteurs en tension.

La problématique engendrée par le non renouvellement des contrats des médecins PADHUE dans nos hôpitaux est une aberration pour notre système de santé.

Ces médecins étrangers représentent, par exemple, 60% des médecins de l’hôpital de Gonesse et font vivre notre système de santé territorial. Ils exercent en psychiatrie, en pédiatrie, aux urgences, etc.

L’article 70 de la loi n°2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé a réformé la procédure d’autorisation d’exercice des praticiens à diplôme hors Union européenne (PADHUE). Le décret n°2020-672 du 3 juin 2020 a précisé les modalités de recrutement des PADHUE aux postes de médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes, pharmaciens et biologistes médicaux, afin d’améliorer leur intégration.

Une « Epreuve de Vérification des Compétences » est venue depuis cette date sanctionner leur autorisation à exercer. Ainsi, même s’ils ont déjà obtenu leur diplôme de médecin à l’étranger, qu’ils travaillent depuis des années en milieu hospitalier, ils doivent se soumettre à ce concours très sélectif. Cette épreuve est devenue pour les médecins étrangers, la seule voie d’accès pour continuer à exercer et obtenir le statut de « praticien associé », mieux rémunéré. La seule voie également pour obtenir un titre de séjour et ne plus être en situation d’illégalité sur le territoire français.

Car en effet, même si Monsieur Emmanuel Macron, Président de la République, a annoncé le 16 Janvier 2024 en conférence de presse sa volonté de régulariser « nombre de médecins étrangers qui tiennent parfois à bout de bras nos services de soins », rien n’a été fait en ce sens.

Et concrètement :

  • Très peu de postes étaient ouverts cette année au niveau national : 2 700 postes pour 9 000 candidats. Par ailleurs, le concours ne s’est pas tenu durant la pandémie de Covid ou en 2022 ;

Beaucoup de médecins étrangers ont échoué, ne parvenant pas à concilier la révision du concours avec des semaines de travail intensives dans des services sur-sollicités. Leurs résultats aux EVC ne reflètent ni leurs compétences, ni leur importance dans notre système de soin actuel : à l’hôpital de Gonesse ou à Pontoise, les services sont composés quasi-exclusivement de médecins PADHUE : exemple en psychiatrie 4/5 médecins PADHUE pour 1 chef de service.

  • La sincérité de ce concours se pose pour de nombreux médecins et les témoignages attestent que certains médecins, à statut de réfugié politique, ont obtenu l’EVC avec une note de 10,5/20 quand d’autres médecins étrangers, sous statut différent, ne l’ont pas obtenue avec la note de 14,5/20.

Face à cette situation, le gouvernement a indiqué il y a plusieurs mois que les médecins PADHUE qui avaient échoué à cette EVC pourraient bénéficier d’une autorisation d’exercice provisoire pour 13 mois (renouvelable 1 fois) sans satisfaire aux épreuves de vérification des connaissances (EVC) à condition d’avoir un avis favorable d’une commission nationale, et de s’engager à passer leurs EVC (art. 35).

Sauf qu’un décret d’application devait paraître et qu’il n’a toujours pas vu le jour.

Nous sommes donc face aujourd’hui à une « médecine jetable » :

  • Ces médecins PADHUE sont contractuels et ont un salaire proche du SMIC. Ils sont sous-payés au regard de leurs compétences, de leur investissement et de leur engagement au quotidien ;
  • Ces médecins PADHUE sont en situation irrégulière alors qu’ils travaillent depuis plusieurs années pour notre système de soins et sont sous la menace d’une expulsion du territoire ;
  • La seule perspective pour ces médecins PADHUE, en fin de contrat, est de quitter leur poste pour éventuellement trouver un emploi dans un autre hôpital et tenter leur chance à la prochaine EVC (si elle a lieu) ;
  • Ces médecins PADHUE sont formés par des chefs de services hospitaliers qui passent une importante partie de leur temps à les former, et se trouvent à répéter continuellement cette tâche : quel gâchis humain et financier !

Ces médecins PADHUE sont par ailleurs, ne l’oublions pas, des médecins que les hôpitaux publics eux-mêmes sont allés chercher dans leurs pays pour assurer la continuité du service public.

Récemment, nous découvrons sur le territoire du Val d’Oise des contrats signés avec des médecins PADHUE en hôpital pour une durée de 6 mois : impossible donc pour ces derniers de s’inscrire dans un cadre légal de régularisation de situation.

Selon certains syndicats, 2 000 à 3 000 médecins pourraient être licenciés de leur poste faute de renouvellement de leur contrat.

Cette situation est scandaleuse et inhumaine pour un pays qui se revendique être celui des droits de l’Homme. Cette situation est particulièrement critique et nous sommes au bord de la crise.

Retrouver ci-dessous notre communiqué de presse :

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